Quand je travaillais comme psychologue dans une maternité, les sages-femmes m’ont très souvent orienté des mamans qui n’allaient pas bien, soit juste après leur accouchement, soit en post-partum, soit au cours de la grossesse suivante. Beaucoup avaient en commun d’avoir accouché par césarienne. Certaines d’entre elles étaient traumatisées et les conséquences étaient multiples. Il est pourtant possible de bien-vivre une césarienne.
Ce que j’ai découvert, c’est que lorsque j’informais précisément et concrètement des femmes enceintes de ce qui passe avant, pendant et après une césarienne, celles qui en vivaient une avait un vécu positif. On évite le trauma en ayant déjà le film dans la tête.
Je vous explique ici étape par étape ce que l’on vit lorsque l’accouchement se fait par césarienne.
Que faut il savoir à propos de la césarienne ?
Dans quels cas réalise-t-on une césarienne ?
La césarienne se réalise toujours pour résoudre un problème médical de la mère et/ou du bébé et pour faire en sorte qu’ils se portent bien. La césarienne, dite de confort, c’est-à-dire sans raison médicale, ne se fait pas. C’est le ou la gynécologue qui prend la décision.
3 types de césariennes
Césarienne programmée :
Elle est prévue avant la date d’accouchement. Elle se déroule tranquillement, car il n’y a aucune notion d’urgence. L’anesthésie est locale le plus souvent par rachianesthésie. Si le travail de l’accouchement devait débuter avant la date de l’accouchement, elle se fera alors plus rapidement.
Césarienne semi-urgente :
Elle a lieu en cours de travail ou pas. Il y a une notion d’urgence où on a quand même 30 minutes pour préparer la patiente et mettre en place l’anesthésie locale, rachie-anesthésie, si elle n’en a pas, un renforcement de la péridurale si elle est déjà installée.
Césarienne urgente :
Elle a lieu lorsqu’il y a une grande urgence, c’est-à-dire qu’il faut faire sortir le bébé le plus rapidement possible. Soit la patiente a déjà une péridurale installée et à ce moment-là on lui rajoute une dose adaptée d’anesthésiant, soit elle n’a aucune anesthésie et elle a de grandes chances d’avoir une anesthésie générale.
Le déroulement d’une césarienne : les détails importants à connaitre
Objectif : ne pas subir, mais rester actrice pendant toutes les étapes de la césarienne en sachant ce qu’il va se passer. Rester calme et sereine pour maintenir le lien avec votre bébé et favoriser le bon déroulement de l’opération.
Dans le cas d’une urgence, l’équipe n’a pas le temps d’expliquer en détail ce qui se passe. Ils sont focalisés sur ce qu’ils ont à faire. Il faut changer de place, passer de la salle d’accouchement au bloc opératoire.
Le temps de préparation pour la césarienne
il y a un temps de préparation avant que le gynécologue opère, plus ou moins long selon l’urgence et l’anesthésie choisie, 20 minutes environ. Le père ne sera pas présent durant ce temps pourtant plutôt stressant, même si on vous a dit pendant votre préparation à l’accouchement que le père pourrait être présent. En réalité, l’équipe le fera rentrer au bloc une fois tout installé, juste avant l’opération.
Rasage : le haut du pubis est rasé, car l’incision se fera juste au-dessus de celui-ci.
Anesthésie
Si une péridurale est déjà installée, on vous injectera plus de produit. Si vous n’avez aucune anesthésie, vous aurez une rachi. Si vous avez des contractions intenses et douloureuses, demandez à l’anesthésiste d’attendre que la contraction passe pour ne pas bouger lors de la piqure.
On vous pose une sonde urinaire que vous garderez les premières 24h jusqu’à votre premier levé. Normalement, cela est fait après l’anesthésie et donc est indolore.
Au bloc opératoire
Au bloc opératoire, vous êtes allongés, nue sur la table d’opération, les jambes placées parallèlement.
Vos bras ouverts sont posés sur des repose-bras et sont sanglés. Oui, sanglés, vous avez bien lu. Ceci dans le but de ne pas toucher l’incision et de bien surveiller la tension (un appareil posé sur un de vos bras surveille constamment votre tension tout au long de la césarienne). À noter que souvent les femmes tremblent (d’émotion et de froid, car la température est fraiche dans un bloc opératoire). Un des deux bras a un appareil qui mesure votre tension en permanence. Celui-ci ne doit pas bouger pour faciliter la mesure.
On vous pose un cathéter sur le dessus de la main en général. Cela permet de vous injecter un produit rapidement en cas de besoin.
C’est pendant ce temps de préparation que vous pouvez faire vos différentes demandes :
- Demandez au gynécologue et à l’équipe s’il est possible de baisser le champ et de vous relever la tête lorsque bébé viendra juste de naitre dans le but de le voir naitre.
- Demandez à la sage-femme qui accueillera votre bébé de bien vous le présenter, de manière verticale et à bonne distance afin de faciliter votre vision et de permettre une rencontre yeux dans les yeux. En effet, le premier regard, ou proto regard est vivement conseillé par le Pédopsychiatre Dr Delassus. Demandez lui aussi de vous ramener votre bébé après son premier soin pour faire du peau à peau. Vous serez à ce moment-là en train d’être recousue. Demandez lui aussi de vous amenez votre bébé en salle de réveille. Prenez le temps de lui expliquer clairement votre demande de limiter la séparation avec votre bébé.
- Demandez à l’anesthésiste de bien vouloir vous détacher le bras qui n’a pas l’appareil à tension au moment de la présentation de votre bébé pour pouvoir le toucher. Il sera d’autant plus d’accord si vous êtes calme.
On vous badigeonne le ventre et bas ventre d’un produit désinfectant.
Un grand tissu est posé sur le haut du corps, votre poitrine, puis se relève devant vous afin de ne pas voir l’opération.
Pendant ce temps de préparation, si vous savez tout ce qui est en train de se faire, vous pourrez être calme, en confiance. Je vous invite à respirer tranquillement et consciemment tout en restant connectée à votre bébé même si le fait de ne plus rien ressentir au niveau de votre ventre peut être perturbant. Vous l’oxygénez ainsi correctement. Vous pouvez, en pensée, lui parler, le prévenir de ce qui se passe et ce qui va arriver. Il ressentira votre calme.
Quelqu’un vérifiera que l’anesthésie à bien fait effet en vous demandant si vous ressentez quelque chose alors que l’on vous touche le ventre avec un objet piquant. Osez dire si vous ressentez quelque chose.
Donc concrètement, vous avez l’anesthésiste qui est placé derrière vous ainsi qu’une infirmière anesthésiste. Le gynécologue et la sage-femme sont, quant à eux, de l’autre côté du champ.
Quand tout est prêt, le père entre et s’assoit sur un tabouret au niveau de votre tête. Le champ dépasse largement sur le côté de manière à ce qu’il ne voie pas l’opération elle-même. Une fois que le gynécologue commence l’incision, 5 minutes environ vont s’écouler avant que votre bébé ne soit sorti. Ne soyez pas surprise si vous avez de légères sensations dans votre ventre. Il ne s’agit pas de douleur, mais vous percevez des mouvements. Cela est normal. Le mieux est de vous connecter à votre conjoint ou à la personne qui vous accompagne en vous regardant. S’il a été préparé lui aussi, il pensera à vous parler.
Certains gynécologues vous expliquent ce qu’ils font pendant l’opération, d’autres sont silencieux. N’hésitez pas dans ce cas à poser des questions ou tout simplement à vous exprimer. Rien ne vous en empêche.
A la naissance de votre bébé
Vous entendrez des petits bruits de bouche quand votre bébé sera né, il ne pleurera pas nécessairement. La sage-femme l’accueillera dans une serviette puis elle fera le tour du champ et viendra, s’il va bien, vous le présenter. Dans certaines situations où le bébé a besoin de soin d’urgence, il ne vous sera pas présenté. Il ira directement sur une table pour y recevoir des soins.
La rencontre sera brève, mais elle sera de qualité si vous avez demandé à la sage-femme de vous le présenter correctement et si vous êtes calme. Touchez-le avec votre bras libre.
Ensuite, elle posera votre bébé sur une table qui se trouve soit dans une autre pièce soit dans la salle du bloc opératoire afin qu’il soit aspiré. En effet, les bébés nés par césarienne n’ayant pas eu les poumons comprimés, comme c’est le cas lors d’une naissance naturelle, ont besoin d’un soin immédiatement après leur naissance. La sage-femme utilise un petit tuyau qui aspire le liquide qui est mal évacué. Cela ne dure qu’une minute et souvent bébé pleure à ce moment-là. Le père est présent et peut assister au soin.
Le père ou la sage-femme ramène votre bébé et c’est le moment de faire du peau à peau. Vous serez tranquille derrière le champ pendant que vous êtes recousue.
Notez que certaines mères se sentent étourdies ou nauséeuses pendant ou après la césarienne et peuvent ne pas se sentir disponibles pour accueillir leur bébé. Ne vous en voulez pas, la rencontre ou le peau à peau se fera plus tard. À ce moment-là, le père pourra le faire le temps que vous vous sentiez mieux.
Une fois l’opération terminée
L’opération terminée, vous êtes amenée en salle de réveil. Il s’agit d’un lieu où vous êtes surveillée parce que vous avez eu une anesthésie. Vous devez y rester 2h30. Demandez à ce qu’on vous amène votre bébé. Pour celles qui le souhaitent, elles pourront faire une mise au sein. Le père peut parfois être présent si la césarienne a eu lieu dans la soirée ou la nuit (car il n’y a pas de personnes opérées). J’invite les pères de leur côté à demander, voire insister que bébé soit amené auprès de sa mère le plus rapidement possible en salle de réveil. En effet, tant que la mère se sent bien, il est important de privilégier le lien mère-bébé. Dans le cas où la maman a eu une anesthésie générale, le père fera le peau à peau. Cependant, il peut demander que bébé soit amené à sa mère, dès que celle-ci est réveillée. Idéalement, bébé reste sur sa maman lorsque celleci est ramenée dans sa chambre. Ainsi, la continuité du lien mère-bébé est maintenue au maximum favorisant l’attachement.
Retour en chambre
Ensuite, vous êtes ramenée dans votre chambre. Demandez à garder votre bébé sur vous. Une fois installée, je vous invite à demander à la sage-femme ou puéricultrice de déshabiller votre bébé et de faire ou de refaire du peau à peau. Ne le faites que si vous en avez envie. Votre bébé, ayant passé son temps d’éveil (les bébés sont très réveillés pendant 1h30 après leur naissance), il va maintenant dormir plusieurs heures d’affilée et probablement vous aussi. Alors, installez-vous bien et posez votre bébé couché sur votre poitrine, son ventre contre vous, ainsi, s’il a des remontées de liquide, elles s’évacueront facilement. Entourez-vous d’oreillers afin de vous sécuriser.
Vous restez couchée 24 heures. Ensuite, la sage-femme vous aide à faire votre premier lever. Il est souvent laborieux et douloureux, ce qui est normal. Les trois premiers jours sont douloureux malgré les antidouleurs, ce qui vous empêchera de changer la couche de votre bébé et de lui donner le bain. Le moindre mouvement est compliqué. Par exemple, il est souvent impossible de simplement prendre votre bébé dans son berceau ou de le poser à cause de la douleur. Vous dépendez de votre conjoint ou de l’équipe soignante que vous devez sonner à chaque fois que vous voulez faire quelque chose pour votre bébé.
Par contre, vous pouvez lui donner le sein ou le biberon.
Quelques conseils pour le retour à la maison après une césarienne
Le retour à la maison après une césarienne est différent de celui d’un accouchement par voie naturelle. N’oublions pas qu’il s’agit d’une opération. Or la période postopératoire est toujours très importante. Elle se fera sur un mois, période pendant laquelle il ne faut pas forcer physiquement afin de favoriser la cicatrisation interne et externe.
Cette période est aussi très importante pour le moral des mères. Gardez toute votre énergie pour prendre soin de votre bébé pendant que quelqu’un d’autre s’occupera de l’intendance. Osez demander de l’aide pour tout le premier mois, surtout si le père a prévu de prendre son congé plus tard. Par contre, cette aide n’est pas en priorité pour s’occuper de votre bébé, mais pour faire des courses, des repas. Vous avez déjà dû laisser votre place pendant votre séjour à la maternité assez de temps. Et même si vous êtes fatiguée et que vous vous couchez, gardez votre bébé près de vous et faites les soins allongés s’il le faut. Cela vous aidera à renforcer votre rôle de maman et à tisser des liens d’attachement forts avec votre bébé. Dans tous les cas, respectez-vous, écoutez vos ressentis.
Pensez à contacter le plus rapidement possible votre mutuelle qui, après toute opération, peut prendre en charge une aide pour le ménage. Cette aide peut démarrer et se répartir quand vous voulez (après la reprise du travail du papa par exemple, regrouper les heures ou les étaler).
Prévenir le père qu’il aura à faire l’intendance (repas, rangement et ménage). Évaluez s’il a besoin de soutien ou pas.
En conclusion, se préparer à vivre une césarienne en s’informant concrètement du déroulement permet de diminuer les vécus difficiles et traumatiques de ce mode d’accouchement. Notre cerveau est ainsi fait. S’il a anticipé une situation, même désagréable, celui-ci la digèrera beaucoup plus facilement. Je dis souvent aux mères, que, peu importe la manière dont va naitre votre bébé, l’important est le lien, la rencontre et tout ce que vous allez vivre ensemble par la suite.
