Pour un postnatal serein : pourquoi et comment bien préparer le retour à la maison après son accouchement ?

Le retour à la maison après un accouchement est souvent négligé par les couples qui s’apprêtent à être parents pour la première fois. L’attention est davantage portée sur l’accouchement qui est souvent considéré comme le plus préoccupant. Toutefois, il est important de rappeler que celui-ci marque la fin de la grossesse, et surtout le début de la vie à trois. Le postnatal est une période de grande vulnérabilité pour la mère et cela ne se passe pas toujours comme elle l’avait imaginé. L’enjeu est de taille, car c’est durant cette période que se crée et se renforce le lien mère-bébé. Alors regardons de plus près ce qui se passe durant les premières semaines qui suivent un accouchement, les besoins des nouvelles mamans, pourquoi il est important d’anticiper le retour à la maison et surtout comment le préparer. Nous aborderons également les particularités du postnatal dans les cas d’accouchement par césarienne et prématuré.

Maman épuisée qui allaite
Maman épuisée qui allaite

Le postnatal dans les cultures « traditionnelles »

Dans notre culture européenne moderne, l’attention est surtout portée sur le bébé, très peu sur la mère. Il y a un manque de reconnaissance de l’épreuve physique et psychique qu’elle a traversée ainsi que tous les bouleversements qui en découlent.

Dans la plupart des cultures traditionnelles, il existe une attention toute particulière pour les femmes ayant accouché grâce à des rites qui durent souvent 40 jours, mais qui peuvent aller de 1 à 2 mois. Ces rituels permettent à la mère de rester alitée et de se concentrer uniquement sur son bébé. La mère de la jeune accouchée ou d’autres femmes de la famille ou de la communauté se relaient pour prendre soin de la jeune mère et de son bébé. Parfois, la tradition veut que la mère passe toute la période postnatale chez ses parents. Dans les deux cas, ce temps permet à la mère de se remettre de son accouchement, d’être soignée selon les rituels de sa culture, d’être disponible pour rencontrer son bébé et de recevoir la transmission du savoir des autres mères.  Au cours de ces rites, des soins spécifiques à cette période  sont prodigués à la mère tels que des massages et des aliments particuliers. Cette tradition permet de reconnaitre et de valoriser la mère en tant que personne ayant besoin de soins et d’attention durant cette période vulnérable.

Un post-partum très différent en France

La façon dont se déroule le postpartum en France a considérablement changé avec l’évolution sociétale de la famille, des places et rôles des hommes et des femmes.

Toutefois, contrairement aux cultures traditionnelles, peu de choses sont mises en place pour la mère une fois qu’elle quitte la maternité où tout est organisé pour le bien-être et la santé du bébé. Même si la mère a certaines attentions pendant son séjour, celui-ci est de plus en plus court.

La représentation de la mère en postnatal est souvent celle d’une femme heureuse, épanouie et en pleine forme, reprenant sa vie normale dès le retour à la maison.

Bien que les pratiques évoluent, la présence ponctuelle et de courte durée d’une sage-femme à domicile pendant les premières semaines est souvent le seul accompagnement maternant proposé.

Depuis la création du congé de paternité en 2002, les pères ont la possibilité de soutenir leur conjointe pendant 11 jours puis maintenant 1 mois après la naissance de leur enfant.

Cependant, cela reste loin de l’accompagnement maternant et continu offert par les rites traditionnels.

Que se passe-t-il pour la mère les premières semaines après l’accouchement ?

Le corps physique

Après un accouchement, le corps doit se rétablir de tous les bouleversements physiques qu’il a subis. Il doit faire face à des  changements hormonaux, à la cicatrisation de certains tissus, à la production de lait à assurer ainsi qu’à retrouver un taux de fer optimal. En somme, le corps a besoin de repos et d’énergie pour se réparer tout en prenant soin du bébé.

Le cerveau

Pendant la grossesse, le cerveau de la femme subit d’importantes modifications qui se poursuivent après l’accouchement pour la préparer à prendre soin de son bébé. Ces changements se traduisent par une amplification de sa sensibilité émotionnelle et de ses cinq sens, ainsi qu’une hypervigilance pour protéger son bébé et répondre à ses besoins. Par exemple, une femme enceinte ou qui vient d’accoucher sera plus sensible à l’odeur de fumée en cas d’incendie et sera probablement la première à la remarquer. Cette sensibilité accrue peut également expliquer pourquoi certaines odeurs deviennent insupportables.

Ces caractéristiques ont permis à l’humanité de survivre jusqu’à présent, mais elles peuvent également rendre les mères vulnérables sur le plan psychologique. Elles peuvent être hypersensibles et réagir de manière excessive à certaines situations. Cependant, traditionnellement, les mères étaient entourées et protégées par leur famille et leur communauté, ce qui leur permettait d’utiliser leur sensibilité pour prendre soin de leur enfant en toute tranquillité.

En réalité, les mères sont aussi sensibles que leur bébé. Ce qui est trop pour elles l’est aussi pour leur enfant. Sans le savoir, elles le protègent en ayant des réactions (parfois fortes) de rejet ou de refus  face à certaines situations comme un bruit excessif ou trop de monde dans une pièce. Toutes ces réactions instinctives sont là pour protéger le bébé, car il ne peut pas exprimer ce qu’il ressent.

Le psychisme

La maternité peut réveiller des souvenirs inconscients de l’enfance chez la mère, tels que des blessures émotionnelles, voire des traumatismes, rendant ainsi la femme qui vient d’accouchée très vulnérable sur le plan psychique.

Selon Dr F. Molénat, pédopsychiatre « Devenir mère est à haut risque psychique ».

À cela s’ajoute un phénomène naturel et normal d’identification à son bébé nécessaire pour le comprendre et répondre adéquatement à ses besoins. Cependant, cette identification peut également rendre la mère aussi vulnérable que son enfant.

Quels sont les besoins de la mère en postnatal ?

Limiter la fatigue

Pour limiter la fatigue, il est recommandé :

  • De se reposer et d’obtenir de l’aide, notamment en ce qui concerne les tâches ménagères, la préparation des repas, les courses, prendre soin du bébé, si et seulement si la mère en ressent le besoin, par exemple, si elle veut faire la sieste pendant que quelqu’un promène le bébé. Il est possible de demander à chaque visiteur d’apporter un plat.
  • Maintenir un environnement calme pour pouvoir se concentrer sur son bébé, surtout pendant le premier mois. Les visites fréquentes peuvent fatiguer la mère et rendre le bébé irritable. Il risque de pleurer intensément une fois les visiteurs partis. Les personnes ne se rendent pas compte à quel point recevoir des gens et leur parler demande de l’énergie après un accouchement. Il est donc important de gérer les visites et de trouver un équilibre.
  • Écouter son corps et savoir se fixer des limites.

Dès la fin de la grossesse, je vous conseille de réfléchir aux futures visites et à la manière dont vous souhaitez les organiser et d’en discuter avec votre conjoint. Anticipez et clarifiez vos besoins futurs. Puis informez votre famille et vos amis le plus tôt possible, de la manière dont vous souhaitez que votre période postnatale se déroule. Ainsi vous ne serez pas pris au dépourvu et les personnes auront eu le temps d’assimiler vos choix.

Vous devrez ensuite décider de la fréquence et du nombre de personnes présentes. Le moment venu, je vous invite vivement à exprimer ouvertement vos besoins et vos limites.

allaitement et fatigue jeune maman

Pour le moral de la maman

Une femme qui vient d’accoucher a besoin d’être maternée. C’est comme les poupées russes qui s’emboitent. Pour que la mère puisse materner son bébé de manière efficace, elle a besoin elle-même d’être maternée.

Elle est « comme » un bébé. Ses besoins sont en miroir de ceux de son enfant. Comme lui, elle est très sensible à son environnement, a besoin de se sentir en sécurité, d’être rassurée par une présence bienveillante, et elle peut pleurer souvent.

Les personnes-ressources en postnatal.

Le père

Aujourd’hui, lorsque les parents rentrent à la maison après la naissance de leur enfant, tout repose sur une personne, le père qui, probablement, a pris son congé de paternité, sachant qu’il peut le prendre plus tard. En effet, l’unité familiale est le couple, et la mère a besoin de maternage les premières semaines après l’accouchement. Certains pères apprécieront et excelleront dans cette mission de maternage, tandis que d’autres pourront ne pas se sentir à l’aise dans ce rôle. Dans ce cas, il est important de trouver ensemble une organisation qui convient à tous les deux, sans faire pression sur le père. Les attentes peuvent être très fortes et générer des tensions dans le couple, mais cela ne doit pas faire de lui un mauvais père. Il est possible de trouver d’autres solutions, en faisant appel à d’autres personnes. Tout dépend de la disponibilité de votre entourage.

père avec son bébé

Les autres personnes

Étant donné que les mères ont besoin de maternage, elles peuvent ressentir  le besoin de se rapprocher de leur mère. Souvent, elles se jugent d’avoir de telles pensées et n’osent pas les exprimer, car cela ne fait pas partie de leurs repères habituels, alors que cela est tout à fait légitime. Ce besoin est particulièrement présent durant le premier mois après l’accouchement. Je les encourage à se rendre chez leurs parents, ou de les faire venir chez elles, surtout si elles se sentent tristes, déprimées ou dépassées.

Ces émotions correspondent à la phase d’identification au bébé qui a besoin d’être materné. En étant entourées et maternées par leur mère, elles se sentiront en sécurité et seront totalement disponibles pour prendre soin de leur bébé. Ce qui est remarquable, c’est qu’au bout d’un mois environ, les mères en ont assez, leurs parents les agacent à nouveau. Elles veulent rentrer chez elles et les choses rentrent progressivement dans l’ordre.

Bien entendu, le rôle maternant n’est pas exclusivement réservé à  la grand-mère maternelle. Toute femme bienveillante et en qui la mère a confiance peut jouer ce rôle. Dans certains cas, même un homme peut jouer ce rôle maternant.

Lorsqu’une femme qui vient d’accoucher a besoin de la présence de sa mère, cela peut faire ressentir de la frustration et un sentiment d’exclusion à sa belle-mère. Il est important de reconnaitre que les deux grands-mères n’ont pas la même place, au moins au début. Idéalement, le père devrait rassurer sa propre mère et lui expliquer la situation de sa conjointe, en lui faisant comprendre qu’elle pourra bientôt prendre sa place de grand-mère.

Les particularités du postnatal lors d’un accouchement par césarienne

L’accouchent par césarienne peut être une expérience difficile pour les femmes, ce qui peut avoir un impact direct sur le postnatal. Étant donné que 1 femme sur 5 accouche par césarienne, il est, d’après moi, important de s’y préparer psychologiquement pendant la grossesse. Vous trouverez toutes les informations nécessaires dans cet article.

Rappelons qu’une césarienne est une intervention chirurgicale visant à extraire un bébé de l’utérus de sa mère par une incision de la paroi abdominale et utérine. Cette intervention nécessite donc une double cicatrisation, ce qui signifie que la mère doit faire face à une période postopératoire en plus d’une période postnatale habituelle. Les femmes ayant subi une césarienne ne reçoivent  généralement pas plus d’attention que les autres, car l’attention est principalement portée sur le bébé. Cependant, les douleurs peuvent être très fortes pendant la première semaine et persistent généralement encore deux semaines. Par conséquent, la mère doit impérativement se reposer, s’allonger régulièrement et se consacrer exclusivement à son bébé. Il est à noter que si vous contactez votre mutuelle après une césarienne, celle-ci vous proposera une prise en charge de quelques heures d’une aide-ménagère comme dans toutes les suites d’opérations.

Les particularités du postnatal lors d’un accouchement prématuré

Lorsqu’un bébé né prématurément (avant 35 semaines), il est hospitalisé en néonatologie et placé dans une couveuse. Les mères sont alors séparées de leur enfant et sont souvent très inquiètes. Plus le bébé est né prématurément, plus l’équipe médicale lui prodigue des soins. Les parents sont progressivement impliqués dans les soins. Cependant, de nombreuses mères se sentent dépossédées de leur bébé pendant ce séjour. Elles m’ont souvent fait part de leur ressenti selon lequel le retour de leur bébé à la maison était vécu comme une deuxième naissance, car c’est seulement à ce moment-là qu’elles se sentaient pleinement mères. En effet, le séjour en néonatologie est en quelque sorte le prolongement de la grossesse, où le bébé est dans un environnement fermé et très protégé. Les visites autres que celles des parents sont interdites et lorsque bébé rentre à la maison, il a approximativement l’âge qu’il aurait eu s’il était né à terme. Il est donc important de le considérer comme un nouveau-né et de limiter les visites les premiers jours afin de vous retrouver avec votre bébé et de prendre enfin pleinement votre place de mère.

Souvent, la famille est très impatiente de voir le bébé. Cependant, elle ne se rend pas toujours compte de ce que vous vivez et ressentez. Je vous invite là encore à leur expliquer dès que possible votre situation et vos besoins. Pour éviter tout incident diplomatique, vous pouvez leur dire que ces conseils viennent du pédiatre du service.

À ceux qui côtoient une femme qui vient d’accoucher

Les mères ont souvent du mal à exprimer leurs besoins d’aide et encore moins celui d’être maternées. La société actuelle pousse les femmes à être fortes, à tout savoir et à pouvoir tout faire même pendant la période de maternité. Cependant, reconnaitre son besoin de soutien et d’entourage pendant la grossesse et le postnatal ne fait pas de la femme un être faible. Il est important de se rappeler l’exploit extraordinaire qu’elles accomplissent tout au long de la grossesse, de l’accouchement et après. Les femmes elles-mêmes devraient reconnaitre la force incroyable qu’elles déploient pour la création, la gestation, la mise au monde et faire grandir un petit être.

En attendant que notre société reconnaisse les besoins de soins et d’attention de la femme qui vient de donner naissance, c’est à vous, les mères, d’anticiper et d’organiser cette période postnatale en informant votre entourage de ce que voulez même si cela étonne et bouscule. Les évolutions sociétales se font pas à pas. Vous pouvez aussi partager cet article avec vos proches. Et à votre tour, quand une personne de votre entourage aura accouché, vous verrez les choses autrement.

À ceux et celles qui sont proches d’une accouchée, au lieu de vous précipiter chez pour elle pour vous faire plaisir en prenant le bébé dans vos bras, pensez en premier lieu à la mère et demandez-lui ce dont elle a vraiment besoin, ou osez lui offrir quelque chose pour elle. Son bébé a déjà tout. Il a la présence et l’amour de sa mère et de son père. Si vous voulez offrir quelque chose, offrez-le à la mère. Car les bébés ont besoin, avant toute chose, que leur mère se sente bien, qu’elle soit détendue. Offrez-lui du temps, un bon petit plat, un massage, un service ou tout autre chose qui l’aidera. Au lieu d’offrir un énième doudou, offrez-lui quelque chose qui la soutient dans son quotidien comme des vidéos sur le sommeil des bébés. Les difficultés de sommeil chez les bébés augmentent l’épuisement parental. Et malheureusement, il y a encore très peu d’informations sur le sujet.

Comprendre les enjeux du postnatal et s’y préparer, dès la grossesse, c’est mettre toutes les chances de son côté pour que celui-ci se passe bien, assurant ainsi le bon déroulement de la suite.

S’informer et informer l’entourage sur ce sujet avant l’accouchement peut contribuer à changer les représentations.

 

Ecoutez en Pocdcast

Partager ...

A découvrir également ...

Sommaire

Mon bébé dort

Un programme vidéo sur le sommeil des bébés de 0 à 4 mois